Découvrir le métier d’éducateur ou éducatrice spécialisée
Cette semaine, Lucie, 23 ans, éducatrice spécialisée, s’est prêtée au jeu de notre interview.
Peux-tu nous décrire ton métier ?
« Alors, je suis éducatrice spécialisée en protection de l’enfance. Cela consiste à protéger les enfants de l’environnement extérieur, des problèmes familiaux, des difficultés rencontrées dans leurs parcours et qui font face à la justice et au juge des enfants. Actuellement, je travaille dans une MECS (Maison d’Enfance à Caractère Social) où j’accueille des jeunes de 13 à 21 ans. Ici, c’est comme leur maison, on s’occupe de leur quotidien, de leurs rendez-vous médicaux et de leur scolarité. Auparavant, j’ai déjà travaillé dans un foyer d’accueil spécialisé. On travaillait avec des adultes en situations de handicap mental ou physique lourd. On s’occupait de leur quotidien et on leur proposait des activités pour maintenir leurs acquis. »
Quelle formation pour être éducateur spécialisé ?
Quelles études as-tu suivies pour devenir éducatrice spécialisée ?
« J’ai fait un baccalauréat ES* et ensuite, j’ai tenté les concours de l’IRTESS à Dijon. L’IRTESS c’est l’Institut Régional du Travail Educatif et Social de Bourgogne qui regroupe toutes les études du social (assistant·e social, moniteur éducateur, …).
Pour se préparer aux concours, il existe des prépas car le concours est assez difficile. De mon côté je l’ai obtenu du premier coup sans avoir fait de prépas. Après le concours, j’ai donc fait 3 ans d’études à l’IRTESS et j’ai eu mon Diplôme d’Etat** d’éducatrice spécialisée. Pendant mes 3 ans d’études, j’ai effectué 4 stages très professionnalisants. J’ai trouvé que les stages apportent un vrai plus à la formation. On se confronte à la réalité du terrain. Ça nous permet aussi de voir différents publics avec lesquels on pourra travailler ensuite. Les stages nous permettent de savoir vers quel public on aimerait travailler après nos études.
Personnellement, j’ai effectué deux stages avec des personnes en situation de handicap et deux en protection de l’enfance (il existe aussi des stages en exclusion, avec les réfugiés, les migrants, les personnes sans domicile fixe, etc). J’ai tout de suite préféré travailler en protection de l’enfance car j’ai beaucoup aimé le travail autour de la parentalité, des familles et des enfants. »
Pourquoi devenir éducateur spécialisé ?
« Je crois que je n’ai pas de réponse à cette question, mais c’est un “métier passion”. J’ai toujours aimé être à l’écoute des autres et les aider, je crois que c’est ce qui m’a motivé à m’engager dans ce milieu. Au lycée, j’avais une CPE qui m’a parlé de son parcours, elle avait fait éducatrice spécialisée avant de devenir CPE. C’est en discutant avec elle que ça m’a conforté dans mon choix et que je me suis décidé à passer les concours. »
Qu’est-ce qui t’as donné envie de suivre cette formation ?
Quels sont selon toi, les points positifs et les points négatifs de ton métier ?
« Comme points positifs, je dirais que c’est d’abord la relation à l’humain qu’on développer en exerçant ce métier. C’est avant tout pour cela que je me suis engagée dans cette voie. Je dirais également que ce sont les activités. On accompagne les enfants à toutes sortes d’activités sportives ou culturelles qui sont intéressantes aussi bien pour eux que pour moi.
Au niveau des points négatifs, je dirai avant tout le salaire. Je trouve qu’on n’est pas assez rémunéré par rapport au travail que l’on fournit et à la charge de travail que l’on a. Ensuite, on travaille aussi avec des partenaires qui peuvent parfois mettre un frein à nos actions . Toutes les procédures peuvent parfois nous bloquer dans notre travail et décevoir aussi bien les enfants que nous.
Aussi, on travaille avec des enfants qui ont des parcours de vie compliqués. C’est parfois difficile psychologiquement pour les éducateur·rices spécialisé·es de faire face à cette violence ou ces frustrations. En résumé, il y a surtout beaucoup de contraintes auxquelles il faut faire face. Mais c’est un travail qui te fait grandir chaque jour et qui favorise notre remise en question perpétuelle sur notre façon de travailler.«
Quels sont les préjugés que tu entends souvent sur ton métier ?
« On nous dit souvent qu’en tant qu’éducateur·rices spécialisié·es, on ne fait pas grand chose à part emmener les enfants à la piscine ou à la fête foraine. C’est totalement faux, il faut prendre en compte tout le versant éducatif, psychologique et les relations partenariales. »
Quels débouchés pour le métier d’éducateur spécialisé ?
As-tu des projets professionnels pour les prochaines années ?
« Actuellement, je suis en transition professionnelle. J’adore mon métier, mais je dois avouer que les horaires sont parfois difficiles (7h à 23h) et on travaille aussi le week-end. Je trouve qu’on est assez mal payé et que tout ça ne favorise pas la vie familiale et sociale que j’aimerais avoir. Donc, j’aimerais devenir CPE. Je voudrais rester dans le milieu éducatif car j’aime travailler avec des enfants.
Être CPE consiste à s’occuper des jeunes, créer des projets, mener une équipe et avoir plus de responsabilités. Et puis les horaires sont aussi plus accessibles à la vie de famille. Pour mener à bien ce projet, j’ai effectué une troisième année de licence à distance en Enseignement Formation Education Culture et je travaille à côté en tant qu’éducatrice spécialisée. Il faut savoir que le diplôme d’éducateur.trice spécialisé.e ne délivre qu’un bac +2, c’est pour cela que je dois faire une troisième année de licence afin d’entrer en master MEEF. Après le master il faudra passer les concours de CPE. »
Que conseillerais-tu à a des parents qui s’inquiètent de l’orientation de leur enfant ?
« Quand j’étais perdue dans mon orientation, mes parents m’ont payé un accompagnement dans une entreprise qui s’appelle Acadomia pour avoir des conseils personnalisés avec une conseillère d’orientation. J’ai eu de la chance, mais il y a aujourd’hui de très bonnes structures gratuites qui peuvent aussi vous accompagner. Honnêtement, je crois que cela ne m’a pas trop aidé parce que le côté social n’est pas trop ressorti de mon profil à la suite des tests. Pour finir, je dirais surtout à tous ces parents de rester ouverts à toutes les pistes que leurs enfants peuvent proposer, de les aider à construire leur projet, mais aussi à déconstruire les représentations qu’ils peuvent avoir de ces métiers. Il faut surtout rester à l’écoute et les encourager à suivre leur voie quelle qu’elle soit !«
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*ES : Baccalauréat Economique et Social, une des trois anciennes séries du baccalauréat général
**Diplôme d’Etat (ou DE) : formation diplômante, résultant d’une formation effectuée dans un secteur spécifique comme la santé ou le social
*** Diplôme universitaire : s’obtient après un cursus de licence, de master ou de doctorat à l’université